Discours d’inauguration de la BAP 2025

Discours de François de Mazières :

Mesdames et Messieurs,

Je tiens tout d’abord à saluer chaleureusement la présence de Laurent Salomé, président du Château de Versailles, ainsi que de Nicolas Dorval-Bory, représentant l’École Nationale Supérieure d’Architecture. Leur soutien, leur engagement et leur hospitalité sont essentiels au rayonnement de cette Biennale.

Beaucoup d’entre vous connaissent le principe de la Biennale d’Architecture et de Paysage, cet évènement à une double singularité : elle est entièrement consacrée à l’architecture et au paysage.

Notre manière de penser la ville est en pleine transformation. Lorsque j’étais à la Cité de l’architecture et du patrimoine, j’ai pu constater à quel point cette évolution était profonde. Une véritable prise de conscience collective s’est imposée : le fait environnemental n’est plus un simple paramètre, c’est une nécessité absolue. Il nous oblige à repenser radicalement l’architecture. Je me souviens que, dans les premières années, autour de 2004, évoquer la Haute Qualité Environnementale (HQE) rebutait certains architectes, qui craignaient pour leur liberté créative. Pourtant, dès 2009, avec l’exposition Habiter écologique, puis en 2011, avec La Ville fertile, nous avons vu émerger une véritable appropriation de ces enjeux par le monde de l’architecture. Le paysage, lui aussi, est devenu un acteur central de cette réflexion.

Depuis, l’évolution s’est accélérée. Je salue à ce titre l’engagement sans faille de la Région Île-de-France, et de sa présidente Valérie Pécresse, pour financer et soutenir cette Biennale. Ce soutien nous permet, avec celui de la Ville de Versailles et de la Métropole du Grand Paris, d’enrichir cette manifestation et de la faire vivre dans des lieux d’exception.

Nous voulons faire de cette Biennale une prise de parole forte, presque à l’encontre de l’air du temps.

Avec l’ère Trump, l’urgence climatique semble reléguée au second plan dans le discours international, cependant la planification écologique subit un essoufflement préoccupant en France – je pense notamment à une année 2024 très alarmante en matière de construction durable –, nous voulons affirmer haut et fort la nécessité de se mobiliser.

La Biennale se déploie cette année dans des lieux magnifiques : le Potager du Roi, l’École nationale supérieure de paysage, l’ancienne Poste, le Musée Lambinet, l’espace Richaud, et même sur les grilles de la Ville de Versailles. Ces lieux sont le reflet d’un engagement commun pour une architecture ancrée dans la réalité écologique et sociale.

La conception de cette Biennale s’est faite de manière collective. Elle est le fruit d’un travail de longue haleine avec les commissaires que nous avons choisis avec soin, à travers un appel à projets organisé notamment par les écoles. Je veux ici saluer Philippe Rahm, architecte suisse, professeur à Harvard, reconnu pour ses recherches sur les effets du réchauffement climatique, ainsi que sa co-commissaire Sana Frini, engagée sur ces mêmes questions depuis le Mexique, où elle prépare notamment le pavillon mexicain à la Biennale de Venise. Ils ont été aidés par Nicolas Dorval-Bory, commissaire de la précédente BAP! à Versailles, successeur de Jean-Christophe Quinton à la tête de l’École Nationale Supérieure d’Architecture.

Henri Bava, président de la Fédération française du paysage, avec ses associés de l’agence TER, présente une installation saisissante et très ambitieuse à l’École nationale supérieure de paysage. Une immense table scénographiée par la talentueuse agence 5.5, traverse le Potager du Roi, comme un pont entre les époques : il y a quatre siècles, on cherchait ici à augmenter la température pour cultiver des légumes sur de longues périodes ; aujourd’hui, l’enjeu est de la faire baisser. Merci à Alexandra Bonnet, directrice de l’École Nationale Supérieure de Paysage.

Christine Leconte et Cécile Diguet, que je remercie également, nous proposent une exposition dans l’ancienne Poste. Christine Leconte, lorsqu’elle présidait l’Ordre des architectes, a publié Réparons la ville !, un ouvrage marquant sur les défis de l’architecture écologique. Leur projet place l’accessibilité pour tous les publics au cœur de la démarche de la Biennale, car les enfants aussi sont des acteurs de la lutte contre le réchauffement climatique.

Sur l’esplanade du Château de Versailles, vous découvrirez un pavillon imaginé par Jean-Christophe Quinton : un geste architectural sobre, horizontal, qui propose une photographie cadrée du Château, et invite les passants à poser un regard nouveau sur ce lieu emblématique. Merci à la Métropole du Grand Paris qui a financé ce pavillon.

Le Musée Lambinet accueille le paysagiste belge Bas Smets, qui travaille beaucoup à l’international, y compris en France. Il y présente une réflexion sur le climat à travers ses projets réalisés à Anvers, Arles, ou encore sur le parvis de Notre-Dame de Paris. Merci à Suez qui a accompagné cette exposition.

Enfin, à l’Espace Richaud, ancien hôpital que nous avons reconverti, nous vous invitons à découvrir comment une ville comme Versailles peut concilier patrimoine et modernité, exigence écologique et efficacité urbaine.

Plusieurs expositions complètent ce parcours : Quand la ville dort, une exposition photographique de Nicolas Davy, présentée par Île-de-France Nature, mais aussi une exposition concernant la préservation du patrimoine près de la gare des Chantiers, ou encore celle dédiée aux éco-quartiers soutenus par la Région Ile-de-France.

Discours de Valérie Pécresse :

Quel bel engagement que celui de cette Biennale d’Architecture et de Paysage, que la Région Île-de-France soutient depuis le tout début de notre mandat. Nous en sommes fiers, car elle incarne une ambition partagée : celle de construire une ville plus humaine, plus résiliente, plus durable.

La Région est en première ligne en matière d’aménagement du territoire. À ce titre, nous venons de franchir une étape décisive : l’adoption de notre plan Île-de-France 2040. Ce plan grave dans le marbre un objectif fondamental : zéro artificialisation nette d’ici 2050.

Cela signifie que, chaque année, nous réduirons notre consommation d’espace, malgré une pression foncière extrêmement forte, malgré la densité de notre territoire, malgré l’obligation de construire 70 000 logements par an – dont deux tiers à des prix abordables. Notre défi est immense : faire vivre notre région, l’accueillir, la dynamiser… tout en la désartificialisant, tout en la préservant. Et pourtant, nous y arrivons.

Nous avons conçu un plan d’aménagement qui respecte nos objectifs économiques, industriels et résidentiels, mais qui prend aussi en compte le bien-être urbain et la spécificité francilienne : n’oublions pas que 75 % de notre région est agricole ou couverte de parcs et de jardins.

C’est dans cette vision que s’inscrit pleinement la Biennale. Elle est à la fois un lieu d’exposition, un lieu de réflexion, et un lieu d’inspiration.

Elle nous permet de comparer nos pratiques à celles du monde entier, de puiser dans d’autres cultures architecturales des idées innovantes, que nous mettons déjà en œuvre ici.

Par exemple, nous avons intégré dans le lycée de Nangis, en Seine-et-Marne, les tours à vent inspirées de l’architecture traditionnelle persane. Nous expérimentons aussi les matériaux biosourcés, le recyclage, la sobriété constructive…

Tout ce que vous verrez ici est ce que nous essayons de répliquer à travers notre plan d’urgence d’Île-de-France. C’est aujourd’hui le deuxième plus grand plan d’investissement de France.

Lorsque j’ai été élue présidente de Région, 200 lycées sur les 460 d’Île-de-France étaient vétustes.

Nous avons engagé ce plan de 6,6 milliards d’euros. 140 lycées ont été reconstruits, 70 sont en cours de reconstruction, et nous en avons déjà bâti 20 nouveaux. Nous les voulons plus intelligents, plus sobres, plus respectueux de l’environnement.

Une présentation de ces réalisations est visible au rez-de-jardin de l’Ancienne Poste, ouverte au public pour la première fois.

Nous travaillons aussi main dans la main avec les maires. Depuis 9 ans, la Région a financé 100 quartiers innovants et écologiques, répartis sur tout le territoire. Chacun tente de nouvelles solutions : récupération des eaux de pluie, des urines, optimisation des ressources naturelles… Autant de petites révolutions du quotidien qui dessinent la ville de demain.

Nous présenterons également une troisième exposition consacrée à la rénovation du patrimoine, domaine dans lequel l’Île-de-France dispose d’une expertise exceptionnelle.

Avec François de Mazières, nous avons conçu cette Biennale comme une réconciliation entre l’homme, la ville, et la nature. Nous voulons une écologie qui régénère, qui fait évoluer la planète et non une écologie qui la pétrifie.

Nous devons réparer les erreurs du passé. En Île-de-France, nous avons trop bétonné, imperméabilisé, oublié les équilibres essentiels. Aujourd’hui, la ville vivante doit se réinventer.

Ce message, je le dis avec conviction, est un message politique. Il engage notre responsabilité d’élus, mais aussi notre capacité collective à faire autrement.

Grâce à l’énergie de François, cette biennale rassemble des commissaires exceptionnels, dont l’inspiration et l’expérience nourrissent cette ambition.

Comme souvent, là où se trouve le mal, se trouve aussi le remède. Le mal, c’est ce que nous avons fait. Le remède, c’est ce que nous pouvons encore faire, ensemble.