Le Mois Molière – Versailles tréteaux
Les Versaillais se souviennent d’un étrange spectacle qui anima leurs rues
il y a près de vingt ans, en 1996 : Francis Perrin, alors directeur du
Théâtre Montansier et connu pour ses facéties dans « Les Grosses Têtes »,
arpentant le pavé de la ville royale avec sa troupe. Traînant une charrette
proche de celle avec laquelle Molière traversait les campagnes de France,
il avait joué tout au long du mois de juin les œuvres du maître incontesté
de la comédie. C’était le commencement du Mois Molière dont la 19’ édition,
qui se déroulera du 31 mai au 29 juin, attend cette année plus de 100000
spectateurs lors des trois cent vingt représentations qui seront données
dans soixante-cinq sites de la ville : la Grande Ecurie, l’allée Le Nôtre,
l’église Sainte-Jeanne-d’Arc ou encore la place du Marché-Notre-Dame.
Lorsqu’il devient adjoint au maire en1995, François de Mazières a au cœur
une passion pour l’art dramatique et en tête le festival du Mai de
Versailles, éteint en 1991. Il propose alors de fonder le Mois Molière, qui
« reçut très vite une forte adhésion de la population : Versailles est une
ville de culture à laquelle les Versaillais sont fiers d’appartenir. Créer
un festival à Versailles leur paraissait naturel ». L’Opéra royal accueille
déjà des spectacles de grande qualité et « des artistes très reconnus dans
des programmations coûteuses ». François de Mazières décide donc de dresser
sur les places de la ville et dans les jardins un festival populaire à un
tarif accessible à tous (seuls 25% des spectacles des dernières éditions
sont payants). Quand, au début des années 2000, Carlo Boso et sa commedia
dell’arte montent sur les planches du Mois Molière pour interpréter
Scaramouche, le festival trouve un essor nouveau. La comédie italienne, à
laquelle assista Molière enfant et avec laquelle il partagea l’hôtel du
Petit-Bourbon, se voit trois siècles plus tard octroyer une place de choix
a ses côtés. Le festival de Versailles et la commedia dell’arte partagent,
de fait, le même souhait de voir renaître le théâtre populaire. « Ce qui
caractérise le festival est de s’appuyer sur les textes classiques comme
ceux de Molière, Shakespeare et Marivaux mais avec la volonté de s’adresser
à tout le monde : les formes d’interprétation des troupes issues de la
commedia dell’arte sont particulièrement populaires et plaisent à un très
large public. » Parmi les sept troupes qui ont élu résidence à Versailles
grâce à la mairie, la plupart sont proches de la commedia dell’arte. Il y a
quelques années, Versailles devint spectateur d’un nouveau type de
spectacle : des créations contemporaines originales. Au long des bosquets
et des allées des jardins du château, on entendit Stéphanie Tesson déclamer
les Fables de La Fontaine dans un spectacle déambulatoire au costumes
extravagants, et on put admirer à la Grande Ecurie la création du « polar
musical » Bonnie and Clyde. Depuis peu, Le Mois Molière puise aussi à la
source antique, « un répertoire trop souvent oublié. Ainsi, en 2013,
l’Antigone de Sophocle a été créée spécialement pour le festival ».
L’édition 2014 est particulièrement éclectique : elle annonce, entre
autres, Hamlet, Un fil à la patte, Le Château de ma mère, et pour les
enfants, Les Fourberies de Scapin ou Le Malade imaginaire. Enième fruit de
ce Mois Molière : la création en 2010 de l’Union européenne du nouveau
théâtre populaire associant quinze festivals de « combattants du théâtre
qui œuvrent pour la renaissance d’une culture accessible à tous, en
réaction au théâtre institutionnel ». Parmi eux, le festival Off d’Avignon.
Pour une grande partie des créations le Mois Molière lui sert
d’avant-scène : les comédiens jouent d’abord sur les tréteaux de Versailles
avant de se produire dans la cité des Papes.
Rens. sur www.moismoliere.com et au 01 30 21 51 39.