François de Mazières : maire bâtisseur (La revue parlementaire)
Homme de culture et inspecteur des finances, le député-maire de Versailles
se veut un élu engagé sur les sujets qui transforment durablement la
France. Toujours dans l’idée de préserver une fragile harmonie.
Rendez-vous est pris dans un café non loin de l’Assemblée. Une serveuse
s’approche et reconnait immédiatement notre invité : « Mais vous êtes le
maire de Versailles ! J’habite place du marché. » Les compliments pleuvent
sur l’édile, dont le regard brille de fierté : « la fête de la musique a
été très réussie ! » Du coup, on nous offre même les croissants.
Une reconnaissance peu étonnante. L’homme est plutôt de ceux qui sont
prophètes en leur pays : adulés dans leur ville mais inconnus du grand
public. Peu habitué des « quatre colonnes », grand, sec, sage, François de
Mazières ne se prête guère au jeu des petites phrases qui font la joie des
journalistes en quête de buzz médiatique. Un profil en voie de disparition
selon lui. Un tort au regard des responsabilités déjà exercées par ce fils
de préfet, qui rêvait de marcher dans les pas de son père.
Après une maîtrise de droit social et un diplôme de Sciences Po, il rejoint
la promotion Fernand Braudel de l’ENA. Il y retrouvera notamment David
Azema (voir LDP 604), Henri Plagnol ou encore Stéphane Richard. S’il
choisit la préfectorale dès sa sortie, il rejoint ensuite l’Inspection
générale des finances afin de concilier sa vie de famille : « Ma femme,
étant à l’époque, à la direction des relations économiques extérieures du
ministère de l’économie et des finances, nos carrières étaient
difficilement compatibles avec ses nombreux voyages à l’étranger. »
Après sa mobilité, le jeune inspecteur des finances se voit recruter comme
chef de cabinet par Edmond Alphandéry, ministre de l’Economie et des
Finances. S’ensuivra une carrière de haut-fonctionnaire, avec pour fil
rouge la culture. Ce « fou de Molière », qui monte sur les planches dès
l’âge de onze ans et écrit des pièces « à ses heures perdues », revendique
pourtant de s’intéresser à la culture « au sens large du terme ». Déjà, en
1996, il crée à Versailles le festival du Mois Molière dont le succès ne se
dément pas depuis. « Spécialiste d’architecture et d’urbanisme »,
reconnait-il du bout des lèvres, il enchaîne les postes dans la fonction
publique, refait un détour par le cabinet en devenant conseiller culture et
communication pour le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin, avant de
prendre la tête de la Cité de l’architecture et du patrimoine, le point
d’orgue de sa carrière dans le public.
Mais François de Mazières se découvre aussi une vocation politique nourrie
par un besoin créatif qui s’est développé au fil du temps. Ses multiples
expériences attirent le regard d’Etienne Pinte, qui le recrute dès 1995
pour en faire son adjoint à la culture à la mairie de Versailles. En 2008,
il décide de se présenter à sa suite et bat largement le successeur de ce
dernier, Bertrand Devys : « ça ne m’intéressait plus d’être adjoint,
j’avais besoin de mener ma propre campagne. » Une confiance que ses
électeurs lui renouvelle aux législatives de juin 2012. « Il n’y a pas de
secrets, continue le député-maire, il faut porter des projets auprès de ses
concitoyens. » Des projets qui s’accompagneront, en plus, d’une maîtrise de
la fiscalité. François de Mazières cherche à associer le travail du maire
et de l’architecte et se dit porteur d’une théorie qui veut « penser la
ville dans un équilibre à la fois environnemental et urbain. » L’homme est
de la race des bâtisseurs, à l’image d’un Antoine Rufenacht, l’ancien maire
du Havre, qu’il admire. » « Mais la défense de la culture pour le maire de Versailles, c’est aussi
acheter local et protéger les emplois de proximité. Très remonté contre le
groupe Amazon, sa voix jusque-là mesurée, tonne contre ses « ravages ».
L’édile veut jouer sur l’éthique collective pour faire prendre conscience
des dégâts causés par la multinationale qui échappe pour l’heure à la
fiscalité française et incite à regarder « derrière le rideau ». Il a déjà
lancé une campagne de promotion : « acheter Versaillais ». Cette volonté de
vouloir incarner sa politique dans des projets l’éloigne des querelles de
partis. Apparenté UMP, il ne ressent pas le besoin de s’en rapprocher
davantage. Pour lui, la politique est ailleurs, dans ces projets de loi qui
passent inaperçus, ces engagements à l’échelle du territoire, dans la
pacification des tensions lorsque le pays va mal. On n’ose pas dire que
tout le reste n’est que littérature…
Joseph d’Arrast, La Lettre du pouvoir.